Respecter l’équilibre politique

Christian Levrat, le Président du PS, a une dialectique spécieuse. Pour justifier un refus de laisser un deuxième siège au Conseil fédéral à l'UDC, il argue du fait qu'au Conseil des Etats cette dernière n'est pas si forte que cela, qu'il faut tenir compte des deux Chambres et que, par conséquent, deux PLR plus deux UDC au Gouvernement, ce serait trop. Que voilà une argumentation d'occasion. Durant toutes les législatures qui ont suivi, en 1959, l'instauration de la formule magique, il aurait donc fallu refuser un deuxième siège aux Socialistes du fait qu'ils n'avaient que très peu de sièges au Conseil des Etats. Allons, il faut trouver autre chose monsieur Levrat. Avoir des réticences par rapport à la politique de fond, soit. Mais pas de contorsion arithmétique. Eveline Widmer Schlumpf a été élue comme UDC contre Christoph Blocher il y a huit ans. Depuis elle s'appuie sur le petit PBD créé alors. Cela ne peut durer ainsi. L'UDC, premier parti en suffrages électoraux a droit à deux sièges au Conseil fédéral si on veut respecter l'idée d'une formule magique reflétant les forces électorales respectives des partis. Ou à aucun siège si l'on estime que cette formation n'a pas sa place au Gouvernement au vu de ses positions. Mais on s'est souvent posé la question à propos des Socialistes, et même au sein de ce parti. Franchement, le peuple comprendrait mal un refus du deuxième siège UDC. Eveline Widmer Schlumpf a eu sa justification, son rôle et son temps. Il faut tourner cette page.

Cette même idée d'équilibre reflétant les diverses sensibilités au sein des électeurs devrait conduire à ce que l'un des deux sièges au Conseil des Etats, dans le Canton de Genève et dans le Canton de Vaud revienne à la droite. Dans les deux cas c'est l'élu écologiste actuel qui devrait être écarté. Toutefois, bien sûr, il y faut un rassemblement de la Droite sans, pour autant, la moindre confusion sur les convictions, les positions et le langage. Mais ici, ce sont les électeurs qui décideront. On verra bien. 

Naturellement, ce respect d'une logique arithmétique conforme au système suisse ne doit pas faire oublier les problèmes de fond. Oui, un durcissement politique sur la question européenne pourrait être une conséquence regrettable de ces résultats. Au Parlement, une majorité claire devra défendre les négociations bilatérales avec l'UE et trouver le moyen de sauvegarder la libre circulation. Oui, la question énergétique est essentielle. Il faudra trouver des majorités balisant les transitions nécessaires pour s'affranchir progressivement du nucléaire sans provoquer une impasse face aux besoins. Et tant d'autres sujets encore. Mais, en Suisse, on doit rechercher des équilibres, des compromis avec les forces existantes, telles qu'elles sont ; à condition que des règles de collégialité soient fidèlement observées dans les exécutifs et que les grands partis privilégient finalement la discussion plutôt que la confrontation permanente.

Respecter une logique d'arithmétique électorale mais réinsuffler un esprit correspondant au fonctionnement de nos instituions : voilà comment devrait s'amorcer la nouvelle législature fédérale.