RPI: Un projet inutile et une hausse d’impôt malvenue en temps de crise

 RPIUn projet inutile et une hausse d'impôt malvenue en temps de crise 

Le Conseil d'Etat vient de déposer son projet de réévaluation du parc immobilier genevois, un projet pourtant inutile et qui déboucherait sur un matraquage fiscal en règle de nombreux propriétaires genevois, ceci alors que nous connaissons une période particulièrement instable suite à une crise sanitaire qui se poursuit aujourd'hui en crise économique et sociale.
 
Ce projet est inutile, car si la LHID (loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes) prévoit que les villas et les PPE doivent être évaluées à leur valeur vénale, il est bien compliqué d'estimer celle-ci pour son propre logement, car il faudrait qu'elle soit mise sur le marché pour en connaitre sa valeur. De plus, le Tribunal fédéral s'est déjà exprimé pour rappeler que le système prévu par le droit cantonal pour évaluer les immeubles sis dans le canton de Genève n'apparait pas contraire aux exigences posées par l'art. 14 LHID (arrêt 2C_194/2018 du 1er octobre 2018 consid. 5.3). Il est ainsi faux de prétendre que les différentes réévaluations qui ont déjà eu lieu ne permettent pas d'avoir une valeur acceptable au regard du droit supérieur.
 
En outre, la LHID n'est pas appliquée de manière uniforme en Suisse, ce que la Circulaire n° 22 de la CSI (Conférence Suisse des Impôts) du 22 mars 2018 intitulée « Règles concernant l'estimation des immeubles en vue des répartitions intercantonales des impôts » constate elle-même en prévoyant un coefficient à appliquer à la valeur du bien selon le Canton dans lequel il a été valorisé. Sous le couvert d'un « Geneva-finish » douloureux pour les contribuables genevois, notre Canton se retrouverait une fois de plus à vouloir en faire plus que les autres.
 
De plus, l'objectif annoncé d'une augmentation de 90 millions de francs des prélèvements fiscaux, alors que notre canton va être confronté à une crise économique sans précédent, conséquence de la crise sanitaire liée à la COVID-19, paraît d'autant moins souhaitable, que c'est une crise des dépenses qui pèse sur notre République, et non une crise des recettes.
 
Ce projet accroît en outre la charge fiscale pesant sur la propriété immobilière et contrevient ainsi à l'objectif constitutionnel de promotion de la propriété privée de son logement. Il encourage l'acquisition et la détention de son logement via une personne morale et décourage la responsabilité individuelle qu'implique la propriété en nom de son propre logement.
 
Concernant la baisse de l'impôt sur la fortune, le PLR estime qu'il s'agit d'une mesure nécessaire en soi, le taux de cet impôt étant le plus élevé de Suisse. Elle ne doit toutefois en aucun cas amener à une suppression ou un amoindrissement du bouclier fiscal. D'une manière plus large concernant cet impôt sur la fortune, une exonération de l'outil de travail serait souhaitable.
 
En revanche, le mesure visant à augmenter l'IBGI (impôt sur le bénéfice sur le gain immobilier) après 25 ans de détention est incompréhensible. L'IBGI est un impôt visant à lutter contre la spéculation avec un taux dégressif en fonction de la durée de détention du bien. Comment peut-on parler de spéculation après 25 ans ? Et avec un taux de 10% perpétuel, Genève serait, une fois de plus, le pire élève du pays en la matière.
 
En matières de compensations, le PLR estime qu'une réduction de l'impôt immobilier complémentaire constituerait une réponse plus juste à l'augmentation de la valeur fiscale d'un immeuble, puisqu'elle porte sur le même objet.
 
Pour ce qui est de la déduction sociale prévue, il s'agit d'une mesure compensatoire satisfaisante dans la mesure où elle pourrait épargner une trop forte hausse fiscale pour les petits propriétaires familiaux qui sont souvent des personnes de 65 ans et plus et qui vivent seulement avec le fruit de leur retraite. Elle pose toutefois un problème d'égalité de traitement évident et constitue, en ce sens, un correctif non pleinement satisfaisant aux effets négatifs de la loi envisagée.
 
En conclusion, le PLR désapprouve cette réforme fiscale et surtout la volonté du Conseil d'Etat d'augmenter les impôts en pleine crise économique, alors que cette même réforme aurait dû se faire en neutralité fiscale, comme l'avait promis David Hiler à l'époque. Seule la baisse envisagée de l'impôt sur la fortune est nécessaire et est à saluer dans un Canton où 3% de la population paye 81% de l'impôt sur la fortune et où le taux est le plus élevé du pays, ce alors que la Suisse est un des derniers au monde à connaître un tel impôt.
 
Si nous reconnaissons la volonté de la Conseillère d'Etat Nathalie Fontanet de trouver des solutions aux problèmes des Genevoises et Genevois et de faire avancer les choses, comme elle l'a fait sur d'autres sujets qui concernent la fiscalité, l'égalité ou la gestion du personnel de l'Etat, nous regrettons ce projet de loi qui cherche à régler un problème qui n'existe pas, ceci sur le dos des contribuables et en pleine crise économique. Genève connaît depuis trop longtemps une crise des dépenses et non pas une crise des recettes, c'est en réorganisant l'Etat que Genève débloquera les moyens de faire face à la crise, pas en étranglant fiscalement ses habitants !