Changement de gouvernance du Grand Théâtre de Genève

Par Michèle Roullet, Conseillère municipale Ville de Genève

Le vote du Municipal pour un changement de gouvernance du Grand Théâtre de Genève est une victoire pour la culture et le Grand Théâtre de Genève. Michèle Roullet, conseillère municipale en Ville de Genève, nous présente l’historique de cette étape majeure pour le futur de cette belle institution musicale.


UNE ÉTAPE MAJEURE

Le 6 mars dernier, le Conseil municipal de la Ville de Genève a voté à une très large majorité (tous les partis sauf Ensemble à Gauche) la proposition du Conseil administratif en vue de réviser le Statut de la Fondation du Grand Théâtre de Genève (FGTG). Cette proposition (PR-1546) est une étape majeure pour donner à l’institution lyrique les moyens de relever les défis à venir et pour mettre fin à une gouvernance qui, avec des salariés qui n’ont pas tous le même employeur, crée des problèmes depuis des décennies.

Inchangé depuis 1964, le statut actuel de la FGTG devait être révisé. Il n’est, par exemple, plus acceptable que le conseil administratif soit l’organe de surveillance du Grand Théâtre, tout en étant membre du Conseil de Fondation. De tels procédés ne sont plus en adéquation avec les normes et pratiques modernes de gouvernance. Le nouveau statut de la FGTG écarte les conflits d’intérêt, garantit l’indépendance de l’autorité de surveillance et répond à une recommandation émise par la Cour des comptes dans son audit de novembre 2020 sur la gouvernance de la FGTG (Rapport n° 161) : « de réfléchir à un processus d'établissement d'un statut unique du personnel pour tous les employés qui travaillent au Grand Théâtre ».

Cette réforme de la gouvernance du Grand Théâtre sera sous la forme d’une fondation de droit public autonome avec un régime d’employeur unique au statut harmonisé.

UNE GOUVERNANCE QUI POSE LE PRINCIPE D’UN EMPLOYEUR UNIQUE : LA FGTG

Depuis des dizaines d’années, le Grand Théâtre de Genève (GTG) connaît plusieurs statuts du personnel : les membres de la direction et le personnel artistique engagés par la FGTG et celui administratif et technique, employé par la Ville. Cette dualité de statut est source d’inégalités, de dysfonctionnements et complique considérablement la gestion des ressources humaines de cette institution. Il est en effet aberrant que la Ville engage du personnel municipal, qui n’est pas géré par un département de la Ville, mais mis à la disposition d’un tiers, le GTG, avec des règlements de fonctionnaires, guère adaptés à la réalité d’une institution lyrique. A cet égard, le Grand Théâtre de Genève fait figure d’exception, puisqu’aucune entité culturelle suisse dans les arts vivants n’est fonctionnarisée !

Cette réforme de la gouvernance du Grand Théâtre sera sous la forme d’une fondation de droit public autonome avec un régime d’employeur unique au statut harmonisé. A l’exception de la direction et du personnel affecté aux fonctions artistiques qui resteront sous contrat de droit privé, tous les emplois seront sous un régime de droit public. Cette réforme pose ainsi des bases claires au canton pour que celui-ci puisse entrer dans la gouvernance du GTG, comme le prévoit la loi pour la promotion de la culture et de la création artistique (LPCCA), adoptée par le Grand Conseil en juin 2023. Elle met également en œuvre l'initiative IN 167 « Pour une politique culturelle cohérente à Genève », plébiscitée par le peuple en 2019, et qui confère de nouvelles responsabilités au canton en matière de politique culturelle.

DES NÉGOCIATIONS AVEC LE PERSONNEL DE LA VILLE À VENIR

Cette révision du statut de la FGTG a été étudiée dans les commissions de la culture et des finances avec de nombreuses auditions : du magistrat en charge de la culture avec sa directrice et un juriste de son département ; du directeur et de la Secrétaire générale du GTG, du Président de la FGTG, d’un avocat ainsi que des représentants du personnel du GTG avec des syndicats. Que ces derniers émettent des inquiétudes au projet de transférer les 190 fonctionnaires municipaux vers la FGTG est compréhensible. Toutefois, l’enjeu de cette réforme, comme l’a dit et écrit M. Kanaan en charge de la culture en Ville de Genève, n’est pas de péjorer les conditions du personnel municipal, mais d’harmoniser, vers le haut, pour tout le personnel du GTG pour mettre fin aux inégalités actuelles.

NÉGOCIATIONS AVEC LE PERSONNEL

Les négociations avec le personnel commenceront lorsque la proposition PR-1546 sera ratifiée par le Grand Conseil. Néanmoins, les fonctionnaires ont déjà manifesté leur opposition, car, ils ne veulent pas changer d’employeur... Pour harmoniser le statut des employés, ils suggèrent une municipalisation intégrale de tous les employés du GTG ! Inenvisageable évidemment ! Comment le canton pourrait-il subventionner et entrer dans la gouvernance d’une institution avec un personnel municipalisé ? La grève du personnel du GTG du jeudi 29 février, qui avait réduit l’opéra « Idoménée » en version concert, était une action coup de poing du personnel de la Ville, qui s’opposait à tout transfert de leur contrat à la FGTG, et qui voulait suspendre ce projet, avant même toute négociation ! L’approbation de ce nouveau statut par le Municipal était donc une décision capitale.

Aussi, le PLR Ville de Genève salue le vote de cette PR-1546 qui simplifie et modernise la gouvernance du GTG, notre institution culturelle phare, reconnue au niveau international, qui fut avec l’Opéra de Francfort et pour la saison 2019-2020, consacrée « meilleure maison d’opéra du monde » !

Le Grand Théâtre de Genève fait figure d’exception, puisqu’aucune entité culturelle suisse dans les arts vivants n’est fonctionnarisée !