La modification constitutionnelle présentée par le conseil d'état et adoptée par le grand conseil vise à changer les modalités d'élection des magistrats du pouvoir judiciaire. Elle est motivée par des risques logistiques et organisationnels lies à l'élection générale des magistrats, prévue pour le printemps 2026. Jean-Pierre Pasquier, député au Grand conseil, nous détaille les raisons pour lesquelles il convient de voter oui à cette modification constitutionnelle.
Un peu d’histoire
Historiquement, le corps électoral cantonal n'a jamais été appelé à se prononcer de manière globale sur l'élection des magistrats du pouvoir judiciaire, malgré les dispositions de la Constitution genevoise. Les élections ont souvent été tacites, sauf quelques exceptions. Cependant, des exemples récents montrent une tendance vers des élections non tacites, ce qui pourrait compliquer l'organisation des élections générales de 2026.
Plus de 600 postes à pourvoir en 2026
L'élection générale des magistrats du pouvoir judiciaire en 2026 devra pourvoir près de 600 postes, répartis entre huit juridictions et subdivisés en 44 fonctions distinctes. Le nombre de juridictions qui ne seraient pas repourvues tacitement et le nombre de candidatures déposées auront un impact sur le matériel de vote. Les électeurs pourraient recevoir jusqu'à six enveloppes contenant jusqu'à 44 bulletins de vote au total. Cette complexité pourrait conduire à la nullité de nombreux bulletins, mettant ainsi potentiellement à mal la garantie des droits politiques, qui doit protéger la libre formation de l’opinion des citoyens et l’expression fidèle et sûre de leur volonté.
La multiplication du matériel de vote complexifierait le travail des imprimeurs et des services de mise sous pli, qui ne seraient pas en mesure de tenir les délais usuels pour la préparation du matériel nécessaire. De tels volumes ne permettraient pas non plus de garantir une livraison en temps voulu par la poste. Ces volumes engendreraient nécessairement des coûts humains et financiers extrêmement importants en ce qui concerne l’impression du matériel de vote et l’envoi de ce matériel à tout le corps électoral, coûts qui n’ont pas encore été chiffrés à ce stade.
Le nombre de juridictions qui ne seraient pas repourvues tacitement et le nombre de candidatures déposées auront également un impact au niveau logistique. Le service des votations et élections doit prévoir de stocker les bulletins de vote pour chacune des 44 élections potentielles, pour les 67 locaux de vote. Le service des votations et élections stockera déjà, au cours du premier semestre 2026, les bulletins de vote de la votation précédente (mars 2026) et sera en train de préparer la votation suivante (mai 2026).
A ces difficultés d’organisation s’ajoute celle du dépouillement qui devrait intervenir par saisie manuelle par des centaines de jurées et jurés à Uni Mail. Le dépouillement manuel des scrutins cantonaux pourrait prendre plusieurs jours, empêchant ainsi la déclaration des résultats le dimanche soir.
Le projet de loi constitutionnelle modifie l'article 123 de la Constitution genevoise pour inclure de nouvelles modalités d'élection. Les juges suppléants, les juges assesseurs, les procureurs extraordinaires et les juges de la Cour d'appel seraient élus par le Grand Conseil.
Une simplification du processus électoral nécessaire
Les modifications proposées visent à simplifier le processus électoral, réduire les risques d'erreurs et de bulletins nuls, et faciliter l'organisation et le dépouillement des votes. En réduisant le nombre de postes à pourvoir par le corps électoral, le projet de loi permet une gestion plus efficace des élections.
Une comparaison intercantonale réalisée par la chancellerie d'État révèle que le cas genevois est unique en Suisse. Dans tous les autres cantons romands, ce sont les parlements qui élisent les membres du pouvoir judiciaire. De plus, lorsque le peuple est amené à élire les magistrats du pouvoir judiciaire, l'élection générale ne concerne jamais plus de 50 sièges à pourvoir. Cette comparaison souligne la nécessité de réformer le système genevois pour aligner ses pratiques sur celles des autres cantons et améliorer l'efficacité du processus électoral.
Lors du débat au Grand Conseil, le MCG et l’UDC se sont opposés arguant que cette loi prive les citoyens de leur droit historique d'élire les magistrats.
Votez OUI à cette actualisation pragmatique
Pour la majorité du parlement, cette modification de loi représente une actualisation pragmatique des bases constitutionnelles relatives à l'élection des magistrats du pouvoir judiciaire. En transférant l’élection de certaines fonctions au Grand Conseil, elle vise à améliorer l'efficacité et la fiabilité du processus électoral, tout en respectant les principes démocratiques de la République et canton de Genève. Cette nouvelle pratique permet de réduire les risques d'erreurs, de simplifier la logistique et d'assurer un dépouillement plus efficace, garantissant ainsi une expression fidèle et sûre de la volonté des électeurs.
Le PLR vous recommande de voter OUI à cette modification de loi constitutionnelle.