Un second mandat au Conseil national

INTERVIEW de Simone de Montmollin, Conseillère nationale réélue

Je mesure chaque jour la force de notre système de milice, à trois échelons et bicaméral au niveau fédéral. C’est une mécanique complexe, mais qui garantit à la fois la stabilité et l’agilité.


LA CAMPAGNE A ÉTÉ LONGUE ET INTENSE, QUELS SERONT VOS SOUVENIRS LES PLUS MARQUANTS ?

Une campagne nationale est toujours intense et par conséquent l’occasion de nombreuses rencontres, discussions et débats. Aux sollicitations des citoyennes et citoyens, s’ajoutent celles des médias et des acteurs des différentes branches. J’ai toujours aimé ces rencontres sur le terrain, dans les marchés ou autres événements. Elles sont sources de discussions parfois inattendues, de confidences, de mouvement de mauvaise humeur aussi, mais qui généralement se terminent en discussions constructives. Elles sont surtout aussi pour beaucoup l’occasion de nous témoigner leur reconnaissance. Et c’est extrêmement gratifiant.

MALGRÉ UNE CAMPAGNE SUR LE TERRAIN TRÈS ACTIVE, LES RÉSULTATS DE CES ÉLECTIONS SONT DÉCEVANTS POUR LE PLR, COMMENT L’EXPLIQUEZ-VOUS ?

Il est toujours facile de commenter le match après l’avoir joué. On trouvera des arguments pour expliquer que nous n’avons pas assez fait ceci, ou sous-estimé cela. J’observe que les résultats genevois sont conformes à la tendance générale au niveau Suisse : montée de l’UDC et du PS, recul des Verts et Vert'libéraux, PLR et Centre au coude à coude. Le PLR perd légèrement en pourcentage mais peu au niveau du nombre de sièges (-1). A Genève, nous avons maintenu le statut quo : 2 sièges au Conseil national malgré le retrait de notre locomotive Christian Lüscher.

Ce qui devra faire l’objet d’une analyse plus fouillée est le résultat de l’alliance de droite, dont le PLR n’a profité ni au Conseil national (aucun siège supplémentaire sur les deux reconquis à droite), ni au Conseil des États.

Le PLR est le parti du compromis et du travail sérieux, celui qui a fondé la Suisse de 1848. Les gesticulations ou les effets de manche ne font pas partie de notre ADN. Et c’est bien ainsi. Inutile de singer les maîtres en la matière, l’électeur préfèrera toujours l’original. Il faut au contraire redoubler nos efforts pour être plus proche du terrain, communiquer nos idées et surtout lancer des projets politiques qui touchent au quotidien des gens.

PENSEZ-VOUS QUE LA FORMULE MAGIQUE DEVRAIT ÊTRE REVUE ? EST-ELLE EN PÉRIL ?

On peut toujours revoir les formules lorsqu’elles ne répondent plus aux enjeux. Est-ce le cas aujourd’hui ? Je ne crois pas. Cette formule prévoit que les 4 plus grands partis nationaux ont respectivement 2 représentants et 1 pour le moins fort. Tant que le Conseil fédéral sera constitué de 7 membres, cette formule restera adéquate. Il faut ici rappeler que le Conseil fédéral doit représenter les partis les plus importants en Suisse. Et que c’est cette représentativité qui lui donne à la fois la légitimité et la stabilité nécessaire. Modifier les règles à chaque élection au motif qu’un parti a gagné ou perdu un dixième de point de pourcentage ne répond pas à ce principe de stabilité et serait contraire à notre système politique.

REVENONS À VOTRE RÉÉLECTION AU CONSEIL NATIONAL : UNE CHOSE QUE VOUS VOUS RÉJOUISSEZ DE RETROUVER AVEC CE DEUXIÈME MANDAT SOUS LA COUPOLE ?

Retrouver les collègues et partager cette première session d’hiver avec la prestation de serment, les élections des présidences des deux Conseils puis du Conseil fédéral… Ce sont des moments forts qui ouvrent la nouvelle législature. Puis retrouver le travail de commissions. J’aurai l’occasion de présider la CSEC-N, ce qui donne une dimension supplémentaire. C’est un mandat passionnant, et j’éprouve beaucoup de plaisir à l’honorer.

ALLEZ-VOUS ABORDER VOTRE DEUXIÈME MANDAT AU CONSEIL NATIONAL DIFFÉREMMENT DU PREMIER ?

Ce premier mandat a été marqué par l’interruption des travaux du Parlement en raison du Covid-19. Ce fut une période particulière et inédite. Rappelons que même pendant la Seconde Guerre mondiale le Parlement avait pu siéger normalement. Plusieurs crises s’y sont ensuite superposées. Cette deuxième législature sera tout aussi intense, mais avec l’expérience qui en découle et la conscience que nos modes de fonctionnement doivent en permanence s’adapter aux nouvelles réalités.

VOTRE VISION DE LA SUISSE, DE NOS CONCITOYENNES ET CONCITOYENS, A-T-ELLE ÉVOLUÉ APRÈS CE PREMIER MANDAT ?

Je mesure chaque jour la force de notre système de milice, à trois échelons et bicaméral au niveau fédéral. C’est une mécanique complexe, mais qui garantit à la fois la stabilité et l’agilité. Notre «vieille » démocratie reste en fait très moderne, peut-être la plus moderne de toutes, en tous les cas la plus résiliente. Malgré les agitations des uns, le climat anxiogène entretenu par les autres, les défiances envers le politique, malgré les idéologues de tout bord qui alimentent les peurs, notre population garde une capacité remarquable à prendre des décisions raisonnables.

PARLEZ-VOUS LE SUISSE-ALLEMAND ?

Non mais j’en comprends suffisamment, certains de mes collègues plus que d’autres ! En revanche, tout le monde parle l’allemand fédéral, ce qui me va très bien.

LE RÖSTIGRABEN EXISTE-T-IL VRAIMENT ?

Je suis plus « Rösti » que « Graben ». On a plus en commun que ce que l’on veut bien croire. Cela dit, il suffit de se promener un peu dans les Alpes bernoises, ou de Suisse centrale pour comprendre qu’il existe des différences de réalités qui conditionnent les perceptions. Au-delà de la langue, c’est une question de vision sociétale selon la démographie et la mixité de population, de réalité géographique selon si l’on possède une frontière avec un pays voisin ou pas, économique selon la diversité des activités... etc. Tous les cantons latins, à l’exception de Fribourg, possèdent une large frontière internationale et donc des liens étroits avec un pays européen. Ce n’est pas le cas de la majorité des cantons alémaniques. Les références culturelles qui touchent aux origines y trouvent donc une expression plus affirmée. À nous de créer les ponts. Cela commence par la maîtrise de la langue.

ET POUR FINIR, UNE NOTE PERSONNELLE : COMMENT S’ORGANISENT VOS SEMAINES ENTRE GENÈVE, VOTRE ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE ET VOTRE MANDAT DE CONSEILLÈRE NATIONALE À BERNE ?

Le travail a toujours été un moteur et ne m’a jamais effrayé, j’y consacre environ 60 heures par semaine. Mais la multiplication des attentes et exigences en tout impose une rigueur d’organisation et dans les priorités. Aussi, je limite les déplacements, source de stress et d’impondérables, concentre mes activités professionnelles si possible à Berne et priorise mes actions politiques en lien avec mes commissions, mon expertise professionnelle, puis mes centres d’intérêts : agriculture, recherche, formation, environnement, énergie. Je passe donc deux jours en moyenne par semaine à Berne. Une moyenne qui va augmenter durant cette législature avec une nouvelle commission et les mandats de présidence. Une bonne hygiène de vie, des moments pour se ressourcer sont indispensables.