FOCUS : Les valeurs du PLR Genève : la responsabilité

Par Geoffrey marclay, Conseiller municipal

Ils ne sont pas des slogans. Ils sont une manière de penser la société, de concevoir le rôle de l’État, et d’affirmer la place de chacun dans la communauté. À travers cette série d’articles, nous vous proposons d’interroger ces valeurs. D’en explorer le sens, la portée, les exigences. Et de montrer pourquoi elles restent, aujourd’hui encore, au cœur de l’engagement libéral-radical. Car défendre des valeurs, ce n’est pas les afficher ; c’est les comprendre, les faire vivre et les assumer pleinement.

La responsabilité : une valeur qui s’incarne

Il y a des mots qui exigent moins d’être proclamés que d’être incarnés. Des mots qui engagent, qui obligent, qui commandent un rapport à soi, aux autres et au monde. La responsabilité est de ceux-là. Moins spectaculaire que la liberté, moins populaire que la solidarité, elle est pourtant au cœur de toute action politique sérieuse - et, pour nous, libéraux-radicaux, elle est une pierre angulaire.

Une tradition suisse fondée sur l’autonomie

Notre attachement à la responsabilité plonge ses racines dans l’histoire politique et civique de la Suisse. Dans les communautés alpines du bas Moyen Âge, la liberté allait déjà de pair avec l’autogestion : se libérer des liens de sujétion impliquait de gérer soi-même ses affaires. Ce que l’on appelait alors « liberté communale » supposait déjà un exercice de responsabilité collective. Dans les vallées suisses, les hommes libres siégeaient à l’assemblée, réglaient les litiges, répartissaient les terres, levaient les milices : ils étaient responsables, non seulement de leur sort, mais du bien commun.

Au fil du temps, cette culture de l’autonomie et de la responsabilité s’est enracinée profondément. La Réforme, en insistant sur l’éthique du travail et la conscience individuelle, a contribué à faire de la responsabilité personnelle une vertu cardinale dans les régions protestantes. Plus tard, au XVIIIe siècle, les idées des Lumières, nourries du droit naturel, viendront poser les bases d’un contrat social fondé sur la double exigence de liberté et de responsabilité.

C’est cette même tradition qui a inspiré les Constitutions de 1848 et 1874. Le citoyen suisse y est considéré non comme un simple sujet de l’autorité, mais comme un acteur du système politique. Il vote, il élit, il paie ses impôts, il participe aux décisions. La démocratie directe, si spécifique à notre pays, est l’expression la plus visible de cette responsabilité citoyenne. Elle confère au peuple une part du pouvoir, mais exige en retour lucidité, engagement et maturité.

Une valeur qui structure le droit moderne

À la fin du XIXe siècle, la responsabilité s’est aussi imposée comme un principe juridique fondamental. Le Code des obligations de 1881 a codifié la responsabilité civile, c’est-à-dire l’obligation légale de réparer un dommage causé à autrui. Cette responsabilité s’est peu à peu élargie, avec l’essor des transports, de l’industrie, des risques techniques. Dès 1875, les compagnies ferroviaires furent tenues responsables en cas d’accident, même sans faute directe - c’était l’introduction du principe de responsabilité causale. La loi sur les fabriques de 1877, puis les dispositifs relatifs à l’assurance accidents en 1918, ont renforcé cette logique : dans une société moderne, la responsabilité n’est plus seulement individuelle, elle devient aussi structurelle.

Tout au long du XXe siècle, la responsabilité civile a été étendue à de nouveaux domaines : circulation routière, aviation, énergie, environnement, génie génétique. Dans certains cas, les risques sont tels que l’assurance prend le relais du droit. Mais la notion demeure : qui agit, doit assumer.
Qui décide, doit répondre.

Une ligne politique exigeante

La responsabilité, pour nous, n’est pas un concept vague. C’est une ligne de conduite. Elle commence par soi-même : être responsable de ses actes, de ses choix, de ses engagements. C’est aussi, plus largement, refuser de se défausser sur les autres - l’État, le voisin, la société - ce qui relève de notre propre devoir.

C’est ce principe qui guide notre vision du rôle de l’État : un État qui garantit les conditions de l’émancipation, mais qui n’infantilise pas. Un État qui protège sans assister. Un État qui encourage chacun à se prendre en main, à développer ses talents, à contribuer selon ses moyens. Car la solidarité authentique ne peut exister sans responsabilité partagée.

Être responsable, c’est aussi accepter les conséquences de ses décisions. Lorsqu’on dépense de l’argent public, on doit le faire avec rigueur. Lorsqu’on légifère, on doit en assumer les effets. Lorsqu’on gouverne, on ne peut pas se cacher derrière la complexité administrative ou la peur du conflit. La responsabilité, en politique, est la marque des esprits clairs et courageux.

Une liberté assumée

Dans notre société contemporaine, cette valeur est parfois battue en brèche. On demande toujours plus de droits, rarement plus de devoirs. On s’en remet volontiers à l’État pour tout résoudre, tout garantir, tout réparer. Mais cette logique ne mène nulle part. Elle conduit à l’irresponsabilité généralisée, à la dilution des engagements, à la perte de sens.

Nous croyons, au contraire, qu’une société forte repose sur des individus responsables. Responsables de leur travail, de leur famille, de leur environnement, de leur communauté. C’est pourquoi nous défendons une école qui forme des esprits autonomes, un système social qui incite à l’effort, une économie qui récompense l’initiative, une administration qui respecte l’expertise et la confiance.

Car la responsabilité n’est pas une contrainte : c’est une liberté en action. Une liberté assumée. C’est elle qui permet à chacun de s’élever, de construire, de s’émanciper. Elle est la condition d’un progrès durable, d’un vivre-ensemble exigeant et juste.

Et c’est pour cela que nous nous engageons. Car défendre la responsabilité, ce n’est pas juger. C’est croire dans les capacités de chacun. C’est faire le pari de l’intelligence, de l’effort, de l’engagement. C’est refuser la facilité, pour bâtir une société digne, solidaire et libre.

« La responsabilité n’est pas une contrainte : c’est une liberté en action.  Une liberté assumée. »