Le Nouveau Genevois invite Arnaud Midez, d’Economiesuisse, à nous parler des Bilatérales III. Ces accords ne sont pas un luxe, mais une nécessité pour préserver notre compétitivité, stimuler l’innovation, garantir la prospérité et préparer l’avenir. Dans une Europe en mouvement, l’immobilisme équivaut à un recul. Les Bilatérales III modernisent un modèle qui a fait ses preuves et garantit à la Suisse un investissement stratégique pour l’avenir.
« La libre circulation n’est pas une ouverture sans limites, mais une immigration de travail, encadrée par nos règles et indispensable à l’économie. »
Chaque jour, des milliers d’entreprises et de travailleurs vivent de la fluidité des échanges avec l’Union européenne (UE). De Genève au Tessin, en passant par Bâle, les régions frontalières illustrent l’importance de relations stables et fiables : exportations, accès à la main-d’œuvre, transports, agriculture ou encore coopération en matière de sécurité. Ces acquis n’ont rien d’abstrait, ils structurent notre prospérité.
Depuis vingt-cinq ans, les Bilatérales I et II offrent à la Suisse un accès inédit au marché intérieur européen. Aucun autre État tiers ne bénéficie d’une telle ouverture sans être membre de l’UE. Ce modèle sur mesure a soutenu notre dynamisme économique, notre capacité à innover et la prospérité de notre pays.
Moderniser un modèle qui a fait ses preuves
Les Bilatérales III ne remplacent pas ce modèle, elles le modernisent. Comme un smartphone qu’il faut mettre à jour pour rester performant, nos accords doivent l’être pour rester opérationnels. Ce paquet prévoit la réintégration de la Suisse aux programmes de recherche européens et aux financements associés, dont Horizon Europe – la « Champions League » de la recherche. Il comprend aussi un accord sur l’électricité, essentiel à la sécurité d’approvisionnement, et un sur la santé centré sur la sécurité sanitaire, qui renforcera la coordination avec nos voisins en cas d’épidémie. Enfin, l’intégration dans l’espace commun de sécurité alimentaire supprimera des obstacles et évitera de nouvelles entraves pour l’agro-alimentaire.
Autre avancée : le mécanisme de règlement des différends, qui permettra à la Suisse de défendre, en cas de litige, ses droits devant un tribunal arbitral paritaire – loin des caricatures sur un prétendu diktat des juges étrangers.
Coopération transfrontalière et leçons du Brexit
Contrairement à un simple accord de libre-échange, qui réduit surtout les droits de douane, les Bilatérales donnent à la Suisse un accès direct au marché intérieur européen. Nos entreprises bénéficient ainsi des mêmes règles que leurs concurrentes de l’UE, sans lourdeurs administratives supplémentaires. Le Brexit l’a montré : depuis la sortie du Royaume-Uni, environ 20 000 PME britanniques – une sur six – ont cessé d’exporter vers l’UE, découragées par les retards et la paperasse. Le libre-échange seul ne suffit pas.
Le prix d’un renoncement
Que se passerait-il si la Suisse tournait le dos à la voie bilatérale ? Selon une récente étude de BAK Economics, l’abandon de la voie bilatérale réduirait le PIB de 7,1 %
d’ici 2045, et le PIB par habitant de 4,7 %.
Entre 2028 et 2045, la perte cumulée atteindrait 685 milliards de francs – soit 45 700 francs par habitant. Les effets seraient durables : plus de barrières, moins d’innovation, des emplois en danger. La compétitivité du pays serait directement affaiblie.
Pas d’adhésion cachée
Avec le nouveau paquet sur la table, certains critiques agitent le spectre d’une « adhésion passive ». C’est faux. La reprise dynamique du droit européen est strictement limitée à six accords d’accès au marché sur les plus de 140 traités bilatéraux que nous avons avec l’UE. Cela signifie simplement que lorsque les règles évoluent dans ces domaines précis, la Suisse les adapte aussi, afin que nos entreprises continuent à jouer avec les mêmes règles que leurs concurrentes européennes. Pas plus. Et en tout temps, le Parlement conserve ses prérogatives, et le peuple garde son droit de référendum. La Suisse choisit donc les domaines d’accès au marché et adapte ses règles lorsque cela sert ses intérêts.
Libre circulation : un compromis équilibré
Sur la libre circulation, les résultats sont clairs : les mesures de protection salariale sont maintenues, renforcées et reconnues par l’UE. S’y ajoute une clause de sauvegarde, sorte de frein à l’immigration en cas de tensions graves, que la Suisse peut décider d’activer de manière autonome. La libre circulation n’est pas une ouverture sans limites, mais une immigration de travail, encadrée par nos règles et indispensable à l’économie.
Une mise en œuvre pragmatique
Si la négociation avec Bruxelles a abouti à un paquet solide, la mise en œuvre interne sera décisive. Elle doit rester simple, adaptée aux besoins des entreprises et éviter toute surcharge administrative (voir encadré).
Choisir l’avenir
Dans un contexte international marqué par les tensions commerciales et les crises géopolitiques comme énergétiques, le vrai risque n’est pas ce paquet, mais son échec. Le statu quo est une illusion : l’UE a clairement indiqué que la voie bilatérale ne pourra se poursuivre qu’avec des accords actualisés. Or, dans une Europe en mouvement, l’immobilisme équivaut à un recul. Les Bilatérales III ne sont pas un luxe, mais une nécessité pour préserver notre compétitivité, stimuler l’innovation, garantir la prospérité et préparer l’avenir.
Bilatérales III : mise en œuvre interne – les prioritésLa mise en œuvre interne doit rester pragmatique et dépourvue de bureaucratie inutile. Les priorités sont claires :
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