Bruxelles, après des négociations tendues, a accepté que les produits venant de l’UE soient taxés à hauteur de 15 %. Certains en Suisse ont appelé ce compromis une défaite. Malgré les efforts de notre présidente, Donald Trump a imposé des droits de douane de 39 % sur les produits suisses ! La Suisse ne doit pas s’isoler et, à l’image de l’UE qui avance en montrant sa masse musculaire, elle a besoin d’amis, notamment l’Europe, pour mieux prospérer et préparer notre futur.
Les efforts de Bruxelles
Il y a quelques jours, j’entendais et j’entendais dire que la Présidente de la Commission européenne avait capitulé devant le Président américain Donald Trump. Pensez donc, accepter que les produits venant de l’UE soient taxés à hauteur de 15 % ! Il aurait fallu refuser, menacer de rétorsions, montrer les muscles. Cette Ursula Présidente serait nulle et Bruxelles défendrait mal les intérêts des États membres. D’ailleurs, la France par exemple, a réagi en disant que le dernier mot n’était pas dit. À l’UDC et chez ses sympathisants, on y voyait le signe qu’un pays seul, mais à vocation mondialiste, comme la Suisse était plus à même de tenir dans une épreuve de force. Certes, la Commission de l’UE avait obtenu 15 % au lieu des 30 dont elle était menacée comme la Suisse. Mais ce compromis s’appelait une défaite.
39 %, un coup dur pour la Suisse
Seulement voilà ! Malgré les efforts méritoires du Conseil fédéral, particulièrement de sa Présidente, Donald Trump n’en est pas resté à sa menace de 30 % de droits de douane sur les produits suisses. Non, sauf retour sur la décision, ce sera 39 % !
Je me suis demandé si, chez nous, les voix qui avaient tellement critiqué Bruxelles allaient observer un silence gêné. Pas du tout au parti UDC qui a tiré de côté en disant que la Suisse ne devrait pas se soumettre à la bureaucratie bruxelloise. Comme si c’était le sujet. Évidemment, une salve contre les accords avec l’UE qui vont faire l’objet d’un grand débat en Suisse et d’une votation populaire. Parfois, on se demande comment le déni de réalité peut servir de plateforme politique.
Si la Suisse a été si lourdement traitée, c’est parce que Donald Trump a les yeux rivés sur le déficit commercial des États-Unis vis-à-vis de la Suisse. Si l’UE dans son ensemble est notre principal partenaire économique, vient ensuite le pays de l’oncle Sam. Marché formidable pour nos produits pharmaceutiques, nos montres, voire des produits agricoles comme le Gruyère, et autres. Il y a aussi l’importance américaine pour notre place financière helvétique. Donc, pour un coup dur, c’est un coup dur.
Donald Trump, un bulldozer à courte vue
Bien sûr on dira que Donald Trump est un bulldozer à courte vue. Il perturbe le libre-échange avec, à terme, des conséquences négatives, voire graves pour tout le monde, y compris les Américains. Bien sûr, on prédit que cela se traduira par une sorte de TVA au détriment des acheteurs et consommateurs américains. Mais le Président, pour le moment en tout cas, n’a cure de telles objections.
Il veut que les entreprises suisses viennent fabriquer, produire, travailler sur sol américain. C’est déjà le cas partiellement. Il est bien possible que les pharmas helvétiques par exemple, aillent encore davantage dans ce sens pour éviter cette taxe. Elles le feraient afin de ne pas la reporter sur leurs prix et d’éviter ainsi de perdre des parts du marché américain. En revanche il en découlerait des pertes fiscales et d’emplois en Suisse.
La Suisse a besoin de ses amis européens
En fait, ce qui vient de se passer éclaire une réalité. En tous domaines, les pays européens ne peuvent se défendre, s’affirmer dans la difficulté que si, bien articulés entre eux, ils peuvent faire valoir leurs attraits mais aussi leur force de frappe unifiée. Montrer sa masse musculaire pour mieux négocier. Que la Suisse, pour des raisons fortes, démocratiques, ne veuille pas adhérer à l’UE, c’est plus que compréhensible. D’ailleurs, l’UE elle-même est ébranlée par des positions nationales contraires. Il n’empêche qu’un isolement trop marqué de la Suisse au sein de l’Europe ne pourra que desservir de plus en plus ses intérêts. Sans parler du rôle que doit jouer l’Europe, Suisse comprise, dans la défense d’un droit international proposant la paix.
En conclusion, je citerai l’ancien Conseiller fédéral Adolf Ogi qui, avec son bon sens, disait en substance ceci : avec sa nature particulière, la Suisse a besoin d’avoir des amis et d’entretenir les liens d’amitié. Dans la dure confrontation mondiale actuelle, où sont nos amis ? Bref, l’UE a dû plier mais elle a mieux sauvé les meubles que la Suisse, prospère mais petite. L’articulation à développer avec l’Europe est essentielle. Une course d’obstacles solitaire poserait de plus en plus de problèmes ; même si l’on veut encore espérer un retour d’une négociation avec Washington.